La surexposition des jeunes aux réseaux sociaux
- Alys Renaud
- 23 janv.
- 9 min de lecture

Les réseaux sociaux : un atout ou une menace pour les jeunes ?
Les réseaux sociaux occupent une place centrale dans notre vie quotidienne, façonnant nos interactions et influençant notre manière de communiquer, d'apprendre et de nous informer. Cependant, leur omniprésence soulève des questions cruciales sur leurs effets. D'un côté, ces plateformes présentent des dangers incontestables : elles peuvent représenter une menace insidieuse pour la santé mentale, tout en compromettant notre droit à l'information et à la vie privée. De l'autre, malgré ces risques, les réseaux sociaux offrent des avantages durables, notamment dans les domaines de la culture, de l’éducation des jeunes et de la solidarité. À travers ces deux conceptions, nous explorons les impacts des réseaux sociaux sur notre société.
Les dangers incontestables des réseaux sociaux
Les réseaux sociaux : une menace insidieuse pour la santé mentale ?
Les réseaux sociaux sont des plateformes potentiellement dangereuses pour la santé mentale. Selon une étude menée par YouGov, 32 % des jeunes de 18 à 24 ans utilisant ces plateformes affirment ne pas s’y sentir bien. Comment peut-on expliquer que ces réseaux aient un tel impact sur la santé mentale des jeunes ? En effet, 65 % des 18-24 ans ont déjà été confrontés à des formes de violences en ligne, selon cette enquête (contre 37 % dans la population générale). Plus inquiétant encore, 45 % d'entre eux confient avoir été "personnellement victimes de violences en ligne", soit deux fois plus que dans le reste de la population : messages privés ou commentaires haineux, harcèlement, photomontages ou vidéos truquées, vol de photos ou de vidéos, diffamation… Les exemples de violences subies par les jeunes adultes sont nombreux. Cette enquête met ainsi en évidence que les violences en ligne contribuent largement à la souffrance psychologique liée aux réseaux sociaux.

Prenons l'exemple de Léna Situations, une influenceuse française qui a été victime de harcèlement médiatique après avoir publié une photo d’elle sur Instagram, en 2021, sans porter de soutien-gorge. Il est absurde qu’une telle précision soit nécessaire, mais cela a pourtant été la raison du harcèlement. Elle a ainsi reçu des messages tels que « le soutien-gorge n’est pas une option ». Sa réponse fut immédiate : « Fermer sa gueule quand il s'agit de dire à une femme ce qu'elle doit porter ou non, c'est pas une option ». En effet, les femmes sont particulièrement ciblées par le cyberharcèlement, étant 27 fois plus susceptibles d'en être victimes. Il est donc important de rappeler que les comportements malveillants en ligne, tels que le harcèlement ou les attaques personnelles, ont des conséquences durables sur la santé mentale des victimes.
Par ailleurs, la comparaison sociale joue un rôle majeur dans la détérioration de la santé mentale des jeunes. La consommation de contenus idéalisés peut engendrer un sentiment d’inadéquation et une faible estime de soi. Une étude menée par la plateforme HypeAuditor révèle que 70 % des influenceurs français admettent retoucher fréquemment ou systématiquement leurs photos avant de les publier sur les réseaux sociaux. Comment les jeunes peuvent-ils s'inspirer de personnalités si 70 % des contenus peuvent être trompeurs ? Une influenceuse qui semble mener une vie de rêve pourrait ne pas refléter du tout la réalité.
Enfin, l'addiction aux réseaux sociaux représente également un facteur de risque pour la santé mentale. Elle peut perturber les rythmes de sommeil, accroître le stress et réduire le temps consacré à des activités bénéfiques pour la santé mentale, telles que les interactions sociales réelles ou l'exercice physique.
Le droit à l’information et à la vie privée mis en péril
Les réseaux sociaux mettent en péril le droit à l’information et à la vie privée des jeunes de manière significative. À l’ère du numérique, ces plateformes deviennent des sources primaires d’information pour de nombreux jeunes, mais elles sont aussi des lieux où leur vie privée peut être facilement exposée, souvent sans leur consentement ou leur pleine compréhension des risques.
D’une part, les réseaux sociaux permettent un accès instantané à une multitude d’informations, et peuvent être des vecteurs de sensibilisation et d’éducation. Cependant, cette abondance d’informations est également un terrain fertile pour la propagation de fausses informations, de théories du complot ou de contenus partiellement vérifiés. Les jeunes, plus enclins à consommer ces contenus de manière rapide et parfois sans esprit critique, peuvent être influencés par des informations erronées, ce qui compromet leur droit à une information fiable et éclairée. L'algorithme des réseaux sociaux, conçu pour capter l'attention des utilisateurs, privilégie souvent les contenus sensationnalistes ou polémiques, amplifiant ainsi la désinformation. Par exemple, lors d’événements mondiaux comme la pandémie de COVID-19, de nombreux jeunes ont été confrontés à des fausses informations circulant massivement sur les réseaux sociaux, rendant plus difficile leur accès à une information précise et vérifiée. Plus précisément, une des fakes news les plus connues durant cette période est « Les symptômes du mpox sont en fait ceux du zona et seraient un effet secondaire du vaccin contre le Covid 19 ».
D’autre part, les réseaux sociaux sont des plateformes où les jeunes peuvent être particulièrement vulnérables en ce qui concerne la protection de leur vie privée. L'omniprésence de ces plateformes dans leur quotidien les pousse souvent à partager des informations personnelles, parfois sans en mesurer les conséquences à long terme. La collecte de données personnelles par ces plateformes, souvent à des fins publicitaires ou pour améliorer les algorithmes de recommandation, constitue une violation de la vie privée des utilisateurs. Les jeunes, moins conscients des implications de ces pratiques, peuvent être exposés à des risques tels que le vol de données, l’usurpation d’identité ou encore la surveillance en ligne. En outre, l’exposition à des contenus privés, comme des photos ou vidéos personnelles, peut être exploitée à des fins malveillantes. De nombreux jeunes ont ainsi vu leurs images partagées sans leur consentement, ou ont été victimes de « revenge porn » (diffusion de contenu intime sans consentement), un phénomène en constante augmentation. La banalisation du partage de contenu intime sur les réseaux sociaux aggrave ce risque, rendant les jeunes particulièrement vulnérables. En 2022, France 2 a publié un documentaire intitulé "Ennemi intime", réalisé par Marie-Christine Gambart. Dans ce documentaire, Samira une jeune femme témoigne en expliquant qu’après avoir quitté son compagnon celui ci a publié des dizaines de photos nus d’elle avec ses cordonnées. Elle confie « J'ai voulu mettre fin à ma vie ». En effet, la loi française prévoit que lorsqu’une personne publie une image ou une représentation qui d’un mineur présente un caractère pornographique est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d’amende.
Bien que de nombreuses lois et régulations existent pour protéger la vie privée en ligne, leur application reste insuffisante, surtout en ce qui concerne les jeunes utilisateurs. L’utilisation d’outils de géolocalisation, de la collecte de données sensibles ou encore des pratiques de profilage personnalisées rendent difficile la garantie d’un véritable droit à la vie privée. Par ailleurs, les jeunes ont souvent une connaissance limitée des paramètres de confidentialité et de sécurité de leurs comptes, ce qui les rend encore plus vulnérables à des violations de leur vie privée. Ainsi, les réseaux sociaux, tout en étant des outils puissants pour la diffusion de l’information et la communication, représentent également une menace considérable pour le droit des jeunes à l’information correcte et à la préservation de leur vie privée. Les entreprises de ces plateformes, tout comme les autorités publiques, ont la responsabilité de mettre en place des protections adéquates pour garantir que les jeunes puissent naviguer dans cet espace numérique sans compromettre leur sécurité ni leur droit à la vie privée.
Les avantages durables malgré les risques des plateformes
Les avantages incontestables pour la culture et l’éducation des jeunes
Les réseaux sociaux jouent un rôle central dans la vie des jeunes, offrant des opportunités uniques pour leur apprentissage et leur enrichissement culturel. Grâce à un accès illimité au savoir, des plateformes telles que YouTube, TikTok ou Instagram regorgent de contenus éducatifs créés par des experts, des enseignants ou des passionnés. Ces ressources permettent aux jeunes de développer de nouvelles compétences, de mieux comprendre des notions complexes ou d’explorer divers domaines comme les sciences, la littérature ou l’histoire. Par exemple, Hugo Travers, connu sous le pseudonyme HugoDécrypte, est un jeune journaliste qui partage des actualités sur les réseaux sociaux. Son public, composé à 63 % de moins de 25 ans, bénéficie de formats attrayants, notamment des vidéos TikTok où il résume l’actualité en une minute. Ces formats concis et dynamiques permettent aux jeunes de rester informés.
Cependant, il reste essentiel de vérifier les sources et de ne pas accorder une confiance aveugle aux informations diffusées sur les réseaux sociaux. En outre, les réseaux sociaux exposent les jeunes à une grande diversité de cultures, de traditions et de perspectives. En suivant des créateurs du monde entier, ils découvrent de nouvelles langues, des formes artistiques variées et des modes de vie différents, ce qui enrichit leur vision du monde tout en développant leur tolérance et leur ouverture d’esprit.
En outre, les réseaux sociaux exposent les jeunes à une grande diversité de cultures, de traditions et de perspectives. En suivant des créateurs du monde entier, ils découvrent de nouvelles langues, des formes artistiques variées et des modes de vie différents, ce qui enrichit leur vision du monde tout en développant leur tolérance et leur ouverture d’esprit.
Contrairement aux méthodes d’apprentissage traditionnelles, les réseaux sociaux offrent une approche dynamique et interactive. Les quiz, les jeux éducatifs ou encore les vidéos engageantes rendent l’apprentissage plus ludique et motivant. Par exemple, César Cultureg, un influenceur suivi par 2,3 millions de personnes sur TikTok, propose des quiz interactifs qui enrichissent la culture générale, comme celui sur les capitales du monde. Ainsi, les jeunes peuvent tirer parti des réseaux sociaux pour s’instruire tout en s’amusant
Solidarité numérique : Les réseaux sociaux comme vecteurs de soutien et d’entraide
Depuis quelques années, les réseaux sociaux sont devenus un outil puissant d’entraide et de solidarité entre les jeunes. De nombreux influenceurs s’appuient sur leur communauté pour mettre en lumière des personnes souvent invisibles dans la société. Par exemple, la guerre en Israël et Palestine a révélé de nombreux témoignages, notamment ceux de Palestiniens qui exposent la réalité du conflit. Le journaliste palestinien Motaz Azaiza est ainsi devenu une figure incontournable sur les réseaux sociaux, souvent qualifié de "voix de la guerre à Gaza". Depuis le 7 octobre, il documente les bombardements israéliens, les déplacements forcés et les conditions de vie précaires, comme la faim. Sa reconnaissance a atteint un nouveau sommet lorsqu’il a été élu « homme de l’année » par le magazine GQ Middle East. Grâce à sa notoriété, de nombreuses cagnottes ont été créées pour soutenir les familles de Gaza.

Dans un tout autre contexte, l’influenceuse Ileauu, connue pour ses vidéos avec son chien, a fait une rencontre marquante avec Patoche, un sans-abri croisé par hasard dans la rue. Cet homme, ayant tout perdu après un accident de voiture qui lui a coûté sa famille et son foyer, a touché le cœur de l’influenceuse. Elle a commencé à publier des vidéos avec lui et a lancé une cagnotte pour recueillir des dons en sa faveur. Cette initiative a mobilisé de nombreux jeunes qui, émus par son histoire, ont contribué en lui offrant vêtements, couvertures et autres aides matérielles.
Ce mouvement a permis à l’influenceuse de concrétiser un projet ambitieux : la création d’un refuge pour sans-abri et femmes en difficulté, baptisé Demeure Monday. L’ouverture de ce refuge, prévue pour l’été 2026, permettra d’accueillir 10 résidents. Ces derniers bénéficieront d’un accompagnement personnalisé par une équipe pluridisciplinaire. En partenariat avec la société Daniel Poussier, spécialisée dans les espaces verts, et une école horticole, les bénéficiaires suivront une formation dans le domaine agricole, avec la possibilité d’obtenir un diplôme grâce à la Validation des Acquis de l’Expérience (VAE). Par ailleurs, des professionnels en ressources humaines les aideront à se réinsérer dans la vie active à travers des ateliers de rédaction de CV, de lettres de motivation, et de préparation aux entretiens.
Ainsi, les réseaux sociaux, souvent critiqués, peuvent être utilisés comme de véritables leviers de soutien et d’engagement, offrant aux jeunes l’opportunité de contribuer activement à des causes qui leur tiennent à cœur.
LES SOURCES :
1. https://www.cidj.com/bien-vivre/sa-vie-numerique/quand-les-reseaux-sociaux captivent-la-jeunesse#:~:text=Sur les réseaux sociaux, 68,de 25 ans (8) .
2. https://blog.digimind.com/fr/tendances/recul-usage-reseaux-sociaux enfants#:~:text=87% des enfants de 11,un réseau social en France…
3. https://www.leparisien.fr/etudiant/vie-etudiante/sante-mentale-32-des-18-24-ans utilisant-les-reseaux-sociaux-affirment-ne-pas-se-sentir-bien VJE26Q2QYJFDBJUSH6CAKPKGHQ.php#:~:text=•Vie étudiante-,Santé mentale : 32 % des 18-24 ans utilisant les,ont été dévoilés ce lundi.
5. https://www.elle.fr/Societe/News/Reseaux-sociaux-70-des-influenceurs-retouchent souvent-leurs-photos-4018687#:~:text=Réseaux sociaux : 70% des influenceurs retouchent souvent leurs photos,-Réseaux sociaux : 70&text=70% des influenceurs français interrogés,poster sur les réseaux sociaux.
7. https://www.francetvinfo.fr/internet/reseaux-sociaux/video-j-avais-envie-d-etre-morte des-femmes-victimes-de-revenge-porn-temoignent_5045086.html
9. https://www.lepoint.fr/societe/hugo-travers-a-22-ans-il-reinvente-le jt-09-09-2019-2334329_23.php#11
11.https://www.la-croix.com/international/guerre-a-gaza-motaz-azaiza-ce-journaliste palestinien-qui-porte-la-douleur-de-son-peuple-20231226#:~:text=Le photojournaliste palestinien Motaz Azaiza,déplacements forcés et la faim.




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